Cette semaine, trois audiences ont eu lieu pour des faits de manifestation, l’un remontant aux mobilisations syndicales et étudiantes du mois d’octobre 2018, les deux autres aux manifestations rennaises des gilets jaunes du mois de février 2019.
Voici un compte rendu rapide des audiences, qui sera suivi dans les temps à venir d’analyses plus détaillées :
Procès 1 : Mardi 9 avril à 16h à Rennes, un camarade comparaissait pour rébellion et refus de signalétique, faits pour lesquels il avait placé en GAV (où il a répondu partiellement aux interrogatoires) après une arrestation le 9 octobre par un équipage de la BAC. Son interpellation avait été menée sur les ordre d’un agent des renseignements territoriaux aux abords de l’université Rennes II, quelques heures après une grosse manifestation en centre-ville où des affrontements importants avaient eu lieu et où une partie du cortège s’était dispersé à Kennedy après une retraite en métro depuis la place Charles de Gaulle.
L’un des flics, évidemment appuyé par le témoignage de son collègue, prétendait que le camarade s’était enfui et l’avait frappé lors de son interpellation.
Le procureur a requis 2 mois de sursis à l’encontre du camarade et l’avocat des parties civiles a demandé 200€ pour l’un des flics et 50€ pour l’autre au titre de leur préjudice.
L’avocat de la défense, Maître Nicolas Prigent, a plaidé la relaxe sur l’ensemble des faits reprochés.
Au final le camarade sera relaxé pour les faits de rébellion mais condamné à 1 mois de prison avec sursis pour le refus de signalétique.
Procès 2 : Mercredi 10 avril, un autre camarade comparaissait pour violence sur personne dépositaire de l’autorité publique, faits supposément commis le 23 février à Rennes dans le cadre d’une manifestation interrégionale des gilets jaunes. En l’espèce, deux flics de la CDI (Compagnie Départementale d’Intervention) l’accusaient de jets de projectiles sur le début de la manifestation (vers 14h45) près de quatre heures avant qu’il soit arrêté sur un barrage de CRS, vers 19h, sur la base d’une identification formelle de sa tenue vestimentaire.
Après une GAV de 24h où il avait répondu aux questions des policiers (sur les conseils douteux d’un avocat commis d’office pressé de se débarrasser du dossier) et accepté l’enquête sociale sur la précarité de sa situation, il était sorti avec une convocation et un contrôle judiciaire impliquant un pointage hebdomadaire et une interdiction de présence sur Rennes jusqu’au procès.
L’avocat des deux policiers portés parties civiles a réclamé au camarade 300€ par fonctionnaire de police. Le procureur, quant à lui, a requis 4 mois de prison avec sursis mise à l’épreuve, dans le cadre duquel s’inscrivent 90h de Travaux d’Intérêt Général. A cela, s’ajoute dans son réquisitoire l’obligation de rechercher un emploi ou une formation, une interdiction de port d’arme, un stage de citoyenneté et une interdiction de séjour à Rennes pendant 2 ans.
L’enquête sociale, qui a produit à charge une note portant sur son absence d’insertion professionnelle, semble avoir joué un rôle important dans cette composante supplémentaire dans la peine requise.
L’avocat de la défense, Maître Prigent, a plaidé de son coté la relaxe sur l’ensemble des faits reprochés.
En définitive le camarade sera condamné pour les faits à 5 mois de prison avec sursis mise à l’épreuve avec 105h de TIG, une obligation de rechercher du travail ou une formation pendant 18 mois et interdiction de port d’arme mais pas d’interdiction de séjour à Rennes.
Jeudi 11 avril, un troisième camarade est passé en procès à Rennes pour transport et détention d’engins incendiaires ou explosifs et fabrication d’engins explosifs artisanaux. Il a été interpellé le 5 février à République lors d’un contrôle préventif effectué par la BST (Brigade Spécialisée de Terrain) qui intervenait dans le cadre d’une réquisition du procureur sur les contrôles et fouilles aux abords de la manif.
Cette arrestation intervenait également dans le cadre d’une enquête préliminaire lancée début février par le parquet sur l’ensemble des manifs GJ à Rennes, dont le camarade a été une des victimes collatérales lors du dispositif mis en place pour l’occasion dans les manifs rennaises.
Lors de la fouille de son sac à dos à République, alors qu’aucun cortège n’était présent, les flics avait trouvé plusieurs pétards, quelques torches, motif retenu pour son interpellation et son placement en GAV.
Lors des perquisitions effectuées à son domicile, les flics étaient directement tombés sur des assemblages d’aérosols scotchés à des pétards, faits qui constitueront le gros des accusations retenues contre lui.
Visiblement peu renseigné sur ses droits et manifestement très mal conseillé par son avocat en GAV, le camarade avait répondu aux questions des OPJ durant les auditions, accepté de donner sa signalétique (photos, empreintes, ADN), et surtout répondu à l’enquête sociale où avait été versé à charge une note portant sur ses problèmes psy (pourtant parfaitement pris en charge médicalement) et sa consommation d’alcool (en l’occurrence quelques bières par jour).
Egalement très problématique : l’employeur du camarade, en l’occurrence l’hôpital Guillaume Reigner, avait été prévenu par les flics avec son accord en GAV. Cet échange lui a valu après son interpellation de nombreux problèmes professionnels alors même qu’il n’avait pas été jugé, signe que s’en remettre aux flics pour contacter son employeur en GAV peut s’avérer souvent désastreux pour notre situation professionnelle et nos conditions de travail.
Enfin, alors que rien ne le contraignait légalement à le faire, les policiers l’ont poussé à leur donner accès à son smartphone lors des auditions ; ils ont fouillé son facebook, ses messages, et ont versé au dossier son adhésion (parfois faites à son insu par d’autres comptes FB) à des groupes FB gilets jaunes censés représenter une menace pour les forces de l’ordres et les institutions.
L’avocat de la défense, Maître Olivier Pacheu, a déposé une demande de nullité basée sur l’absence de PV de contrôle d’identité et une confusion entre les fonctions de police administrative (maintien de l’ordre) et de police judiciaire (fouilles, auditions, placements en GAV) ; l’élément central étant que dès lors qu’un policier est en mission de maintien de l’ordre, il perd son statut d’Officier ou d’Agent de Police Judiciaire.
La procureur a demandé une peine de 12 mois de prison, dont 6 avec sursis.
En plus de la demande de nullité, Maître Olivier Pacheu a plaidé la relaxe pour les faits de transport et détention en manifestation, et a laissé au tribunal l’appréciation après un long argumentaire sur la requalification de la dangerosité des assemblages retrouvés par la police.
Face à la difficulté de statuer sur ce dossier, le rendu a été renvoyé au 28 mai à 14h.
Pour faire face aux importants frais de justice engendrés par ces affaires, nous appelons à soutenir la cagnotte de soutien aux inculpés :
https://www.lepotcommun.fr/pot/axdmt27r
Et, surtout n’oubliez pas les fondamentaux qui beaucoup manqué sur ces dernières affaires :
- AVANT LES MANIFS, PREPAREZ VOS GARANTIES (à ce sujet lire Les garanties de représentation)
- EN GAV NE SIGNEZ RIEN, NE DECLAREZ RIEN (c’est un droit fondamental et il ne peut être retenu contre vous)
- REFUSEZ L’ENQUÊTE SOCIALE (qui est toujours à charge).
- IL EST CLAIREMENT RECOMMANDE DE REFUSER DE DONNER LES EMPREINTES, PHOTOS ET ADN.
- ORGANISEZ VOUS POUR QUE VOS PROCHES PUISSENT PREVENIR VOTRE EMPLOYEUR, ne laissez pas les flics s’en charger
- NE VOUS FIEZ PAS AUX COMMIS D’OFFICE, pour des arrestations à Rennes demandez aux flics de contacter Olivier PACHEU (06 73 07 12 83) ou Nicolas PRIGENT (06 79 48 32 92)
Si vous avez des infos sur d’autres affaires en cours, des convocations, ou des problèmes liés aux manifs et actions, contactez la Défense Collective !