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Une procédure de dissolution contre la Défense Collective a été lancée par le Ministère de l’Intérieur en avril 2024 suite à une demande du Front National à l’Assemblée en octobre 2022, et plusieurs annonces depuis, notamment lors du passage de Darmanin à Rennes en février 2024.

Des nouvelles de la bataille juridique autour de la dissolution de la Défense Collective

Nous avions publié une première tribune en février 2024 lors du lancement de la procédure de dissolution par le Ministère de l’Intérieur, puis un communiqué après le décret d’avril en conseil des ministres.

De quoi Darmanin a-t-il si peur à Rennes ?

Suite à une première plainte impulsée par un député RN en octobre 2022 et une nouvelle menace de Darmanin lors du mouvement contre la réforme des retraites, le Ministère de l’Intérieur a exprimé son intention de dissoudre notre collectif en février dernier, ce qui s’est confirmé par le décret publié mercredi 4 avril en Conseil des Ministres. Après plusieurs mois à préparer notre défense, nous nous apprêtons à affronter le Ministère de l’Intérieur au Conseil d’État pour le premier round de la procédure, lors d’une audience de référé suspension le 26 juin à Paris.

Si cette nouvelle est très grave pour tous les collectifs qui s’organisent comme nous contre la répression des mouvements sociaux en France, elle n’est pas véritablement une surprise. Depuis notre création et ces huit années passées à organiser la défense dans la rue et dans les tribunaux, nous avons été désignés comme la cible prioritaire de la police, des procureurs et de la préfecture de Rennes. Après avoir échoué à nous écraser sous les procès et nous mettre au ban du mouvement social, c’est le Ministre de l’Intérieur en personne qui s’est déplacé à Rennes pour annoncer notre dissolution.

Par cette tribune, nous souhaitons aujourd’hui nous exprimer publiquement, non seulement pour expliquer en quoi cette décision est extrêmement dangereuse pour toutes les personnes qui s’organisent politiquement, mais aussi pour balayer les mensonges des autorités et expliquer qui nous sommes et ce que nous faisons réellement depuis notre création.

Pour nous soutenir, vous pouvez faire un don. Vous pouvez aussi nous suivre sur les réseaux sociaux.

QU’EST-CE QUE LA DÉFENSE COLLECTIVE ?

La Défense Collective a été fondée en 2016 à Rennes et a pour fonction de s’organiser face à la répression des mouvements sociaux par la défense au tribunal des personnes mises en cause et par la participation aux mouvements dans la rue. 

Nous sommes des manifestant.e.s issu.e.s de ces grandes mobilisations, qui, en assistant aux procès des personnes arrêtées, ont compris que la répression judiciaire est une arme plus redoutable que les matraques, les gaz et les grenades pour écraser la contestation politique en France.

Depuis huit ans, nous défendons gratuitement la majorité des manifestant.e.s arrêté.e.s à Rennes avec le concours de trois pénalistes talentueux.ses et aguerri.e.s. Nous permettons aux personnes mises en cause de s’emparer de leur défense, parce que nous leur garantissons l’accès à leur dossier, la participation à l’élaboration de leur stratégie judiciaire, et le soutien financier pour faire appel.

Nous défendons tou.te.s les participant.e.s aux luttes quand bien même nous aurions des désaccords avec elles et eux, à l’exception des balances (avec qui il n’est pas possible de s’organiser collectivement) et des fascistes (ennemis par définition du mouvement). 

Aussi, nous refusons de laisser la répression faire le tri entre les formes acceptables de contestation et les autres : nous défendons l’ensemble des blocages, manifestations, etc. Qu’ils soient spontanés ou organisés, autorisés ou interdits, nos désaccords devant être débattus non pas dans les tribunaux mais dans les espaces d’organisation du mouvement (AG, ronds-points, comités de lutte..).

Nous avons aussi assuré des formations juridiques à des centaines de manifestant.e.s, grévistes, bloqueur.se.s, étudiant.e.s, gilets jaunes, lycéen.ne.s, membres de syndicats ou de partis de tous horizons et milieux sociaux. Dans celles-ci, nous appelons ouvertement à garder le silence en garde à vue, informons sur la prise systématique d’empreintes et d’ADN (que nous conseillons de refuser), et appelons à refuser les comparutions immédiates et toutes les procédures accélérées qui ont permis à une justice d’abattage d’écraser sous des vagues de procès bâclés des mouvements comme celui des gilets jaunes ou les révoltes suivant le meurtre de Nahel.

La lutte contre la répression doit aussi être saisie en amont. C’est pourquoi nous sommes fier.ère.s de défendre une vision émancipatrice de la lutte grâce :

  • à nos ateliers juridiques et stratégiques, où le collectif effectue un bilan des manifestations, actions ou mouvements sociaux passés, et développe de manière participative une réflexion destinée à éclairer les espaces d’organisation du mouvement social dans leurs choix stratégiques.
  • à la distribution et la diffusion de matériel de protection face aux armes de plus en plus létales de la police et de conseils en manifestation et en assemblée
  • à la diffusion d’une culture de la défense et de la solidarité dans les cortèges et bien audelà de notre petite ville, dont un des piliers est la préservation de l’intégrité physique des manifestant.e.s

Ainsi, nous faisons publiquement la promotion des masques de plongée contre les gaz lacrymogènes et les tirs de LBD, des masques anti-poussière ou anti-pollution contre les gaz lacrymogènes, des parapluies contre les tirs tendus… de même que nous faisons circuler des tracts sur lesquels figurent des conseils contre la répression et les contacts des avocat.e.s avec lesquel.le.s nous travaillons régulièrement. Par ailleurs, nos combats dans les tribunaux permettent de constamment réaffirmer la légalité du port de ces équipements, via des jurisprudences acquises après de nombreux procès jusqu’en cour d’appel. C’est pour nous une action d’autant plus indispensable à l’heure où le Ministère a annoncé la commande et l’usage massifs de nouvelles grenades encore plus dangereuses que les précédentes interdites.

LA CRÉATION DE LA « CHIMÈRE »

À travers la défense judiciaire de centaines de manifestant.e.s depuis 2016, nous avons bien appris une chose des dossiers de police auxquels nous sommes confronté.e.s : les enquêteur.trice.s et les services de renseignements rennais ont pour habitude d’attribuer systématiquement à la Défense Collective la responsabilité de tous les agissements politiques tels que les affrontements avec la police ou les attaques contre les entreprises et institutions ciblées par les manifestant.e.s.

Dans cette logique, ils ont créé une chimère politique, un monstre insaissable qu’ils englobent dans l’appellation « Ultragauche-DefCo ». Dans ce fourre-tout sorti tout droit de l’imaginaire d’un.e fonctionnaire de préfecture, « l’UG-DC » regrouperait aussi bien des collectifs militants de la ville, le cortège de tête rennais rassemblant plusieurs milliers de personnes, les « ultrajaunes » radicalisé.e.s et les mystérieux.euses « blackblocks », mais aussi les différentes assemblées de lutte de la ville dont les comités décident des actions de blocage et de manifestation.

Et c’est ainsi que, pour justifier cette dissolution, le Ministère de l’Intérieur nous attribue dans ce décret la prétendue paternité du média militant local Rennes DTR (pourtant indépendant et autonome de toute structure). 

Les publications de ce média, portant sur des sujets beaucoup plus vastes et généraux que celles de la Défense Collective, servent aujourd’hui à légitimer notre dissolution au nom de d’une « provocation à des manifestations armées ou à des agissements violents à l’encontre des personnes ou des biens ». Pourtant, un rapide coup d’œil à nos publications (nous avons nos propres canaux de communication) suffit a démontrer qu’il n’en est rien.

En réalité, ce que vise cette procédure, ça n’est pas seulement un groupe qui défend à son échelle les cortèges et les militant.e.s arrêté.e.s, c’est surtout la dynamique et les pratiques de lutte qui se sont largement diffusées dans les grands mouvements depuis 2016. 

De la Loi Travail à la réforme des retraites, de la révolte des gilets jaunes aux émeutes qui ont suivi le meurtre de Nahel, la répression brutale qui s’est abattue contre tou.te.s celles et ceux qui se sont opposé.e.s au pouvoir aussi bien dans la rue que dans les tribunaux nous a démontré une chose : la défense collective est l’affaire de toute personne qui lutte. 

Et c’est là que cette procédure prend son sens pour le Ministère, puisqu’elle intervient lorsqu’un phénomène politique prend de l’ampleur. Par simple décision du Conseil des Ministres, sans procès ni juge indépendant, une organisation peut alors être déclarée illégale.

En pratique, ce dernier justifie cette décision par les « notes blanches » des services de renseignements, qui sont par nature des informations sans justifications vérifiables ni procédures clairement établies.

Et, depuis 2021 et la mise en place de sa « loi Séparatisme », le gouvernement s’octroie désormais la possibilité de dissoudre sur un critère largement étendu les groupes qu’il suspecte de « provoquer à des manifestations armées ou à des agissements violents à l’encontre des personnes ou des biens« .

C’est désormais sur cette base que les groupes issus du mouvement social sont attaqués, a contrario des groupes d’extrême-droite massivement dissous sur la base de critères liés au racisme et aux discriminations de genre. A contrario aussi des collectifs tels que le CCIF visés par les critères liés aux discriminations et aux agissements terroristes. 

Mais, nous l’avons compris en étudiant les procédures récentes relatives au critère de 2021, les collectifs visés par les mesures de dissolution ne sont pas forcément ceux qui appelleraient ou qui pratiqueraient certaines formes de violence politique. Ce sont les groupes larges, rejoignables, et dotés d’une force d’appel conséquente, dont le discours aurait une certaine popularité au-delà des partis institutionnels et des syndicats : la diffusion d’une forme d’écologie radicale issue des ZAD avec les Soulèvements de la Terre, d’un antifascisme populaire et combatif avec le GALE dans la ville où l’extrême-droite de rue est la plus dangereuse et organisée, et de celles des pratiques issues des gilets jaune avec le Bloc Lorrain dans une région marquée par le reflux des grandes mobilisations ouvrières.

Car c’est bien là le sens premier de la dissolution : renvoyer dans la marge, voire à la clandestinité, des organisations dont le rayonnement déborde bien audelà des frontières des milieux militants radicaux. C’est retracer les frontières, devenues poreuses après huit années de mobilisations sociales, entre les formes et les pratiques les plus combatives du mouvement et des organisations institutionnelles dont les membres étaient enfermés dans une pratique frileuse, défaitiste et dénuée d’offensivité.

Ce qu’a voulu faire taire les autorités c’est leur communication publique foisonnante, leur force d’appel massive ; ce qu’il a voulu empêcher par dessus tout ce sont des modes d’organisation qui tendent à être rejoignables par des composantes parfois très diverses des mouvements et reproductibles au-delà de leurs espaces de création.

Notre expérience de la machine judiciaire et de ses limites nous a aussi fait comprendre qu’il y avait pour le pouvoir un intérêt bassement opportuniste dans cette mesure : pouvoir isoler et calibrer des petits groupes afin de les faire rentrer et juger dans le format pénal (via les associations de malfaiteurs) voire antiterroriste, ce qui ne serait évidemment pas possible pour des organisations regroupant des centaines voire des milliers de personnes.

Nous n’échappons pas à cette logique : dans le cas de la Défense Collective et quoi que soient les justifications du gouvernement, c’est bien parce que notre groupe donne les moyens aux mouvements sociaux de se défendre contre la répression par un ensemble de pratiques rejoignables qu’il est aujourd’hui sous le coup de cette procédure. 

DE LA RUE AU CONSEIL D’ÉTAT

A travers la résistance que nous comptons opposer fermement à cette procédure de dissolution, nous appelons à refuser cet isolement et cette clandestinisation dans laquelle le gouvernement veut nous enfermer et à défendre les collectifs de lutte publics qui sont aujourd’hui très clairement menacés. Nous réaffirmons haut et fort notre refus de la dissociation entre bon.ne.s et mauvais.e.s manifestant.e.s, et la nécessité absolue de garantir l’intégrité physique et le droit à la défense dans les tribunaux pour tou.te.s face à la puissance de l’État. 

Nous réaffirmons que la légitimité est du côté du mouvement social, et rappelons aux organisations qui pensent se protéger derrière le paravent de la légalité que c’est par des combats acharnés et parfois violents qu’ont été obtenues des libertés longtemps interdites : se syndiquer, se défendre au tribunal avec un.e avocat.e, obtenir une retraite, pouvoir avorter ou afficher son homosexualité sans risquer la prison.

À l’heure où le droit de grève est à nouveau directement menacé, et où les héritier.ère.s de Pétain et de l’Algérie Française sont en passe de prendre le pouvoir, nous avons tou.te.s compris qu’on ne pourra pas toujours se réfugier passivement derrière des droits systématiquement attaqués par le pouvoir.

Nous appelons donc à s’opposer à la mesure de dissolution en tant que telle, quand bien même elle s’appliquerait aux groupuscules d’extrêmedroite.

D’abord parce qu’elle n’a absolument pas empêché la progression de l’extrêmedroite institutionnelle (Bardella est d’ailleurs favorable à la dissolution des groupes « d’ultradroite » tels que le GUD), qui se trouve aujourd’hui dans une position de force incontestable après avoir gratté du terrain sur les échecs successifs des mouvements contre les réformes d’austérité.

A l’heure où Macron, dans une obsession manifeste de dissoudre ses problèmes jusqu’à l’Assemblée Nationale elle-même, offre au Rassemblement National la possibilité d’avoir son premier gouvernement en France, nous posons cette question à tous les acteurs des luttes sociales en France : à votre avis, que ferait Jordan Bardella avec un outil comme la dissolution administrative entre ses mains ?

Pour toutes ces raisons évidentes, nous appelons à nous opposer à une loi qui plus que jamais va renforcer les pouvoirs judiciaires d’un État toujours plus autoritaire, liberticide, et a qui a survécu à coups de matraques, de grenades et de procès aux plus grands mouvements que la France ait connu depuis mai 68.

Mais qu’on se le dise : tant que la détermination qui s’exprime dans les rues de France sera là, et jusqu’au Conseil d’État, on ne dissoudra pas un mouvement qui se défend !

– LA DÉFENSE COLLECTIVE

POUR NOUS SOUTENIR DANS CETTE BATAILLE JURIDIQUE

Une cagnotte a été créée qui nous permettra de pallier aux frais de défense face à la dissolution qui s’élèvent à 17 000€ en frais d’avocats, vous pouvez participer !

TENTATIVE DE DISSOLUTION DE LA DÉFENSE COLLECTIVE : L’ÉTAT S’ATTAQUE AU DROIT À LA DÉFENSE ET AU MOUVEMENT SOCIAL

Le premier round des recours contre notre dissolution a eu lieu fin juin 2024, nous donnons des nouvelles de cette bataille dans notre tribune.

Nous avons pris connaissance par voie de presse d’une annonce gouvernementale concernant la dissolution de la Défense Collective.

Cette annonce intervient dans un contexte particulier : la préfecture d’Ille-et-Vilaine, récemment humiliée par le fiasco retentissant d’une longue enquête anti-stup, se trouve prise dans un conflit ouvert et très médiatique avec la mairie, la présidence de l’université Rennes 2 et la bâtonnière de Rennes, pour trouver un bouc émissaire à l’échec cuisant du maintien de l’ordre lors de la manifestation contre la loi immigration du 25 janvier.

Les articles de presse n’ont pas manqué pour attribuer à la Défense Collective, selon leurs habituelles sources policières, la responsabilité de l’ensemble des actes commis lors de cette manifestation (alors qu’aucun procès ni même aucune interpellation n’a eu lieu concernant cette soirée). Ce n’est pas un phénomène nouveau, comme nous l’a confirmé maintes fois l’étude de nombreux dossiers judiciaires et notamment les procès-verbaux de contexte. Systématiquement, et avant toute enquête, la police part du principe que la Défense Collective est responsable de tous les affrontements et dégradations lors des manifestations rennaises.

Publiquement mis en cause de tous côtés pour son échec à maintenir l’ordre lors de cette manifestation, le préfet d’Ille-et-Vilaine peut cependant compter sur le soutien de son ministre. En l’occurrence, le choix est fait de dissoudre la Défense collective par la voie administrative, le gouvernement espérant sans doute éteindre ainsi le foyer de contestation qu’est la ville de Rennes depuis de nombreuses années.

Cette dissolution était déjà envisagée de longue date : au printemps dernier, au plus fort du mouvement contre la réforme des retraites, Gérald Darmanin avait annoncé cette mesure, sans suite à l’époque. Cette fois-ci, il semblerait que le gouvernement compte aller au bout de ses annonces.

Nous le disions à l’époque et nous le réaffirmons aujourd’hui : une telle mesure de dissolution, prononcée contre un collectif qui assure la défense au tribunal des personnes inculpées lors des mouvements sociaux, est une attaque grave et inédite contre les droits de la défense.

Depuis notre fondation en 2016 et le mouvement contre la Loi El Khomri, nous nous réunissons en assemblées publiques hebdomadaires ouvertes à toutes celles et ceux qui souhaitent s’organiser contre la répression des mouvements sociaux. Nous avons ainsi travaillé avec plusieurs centaines d’inculpés et inculpées afin d’élaborer collectivement les meilleures défenses possibles. Nous avons de cette façon obtenu de très nombreuses victoires et jurisprudences utiles à tous les justiciables et à l’ensemble du mouvement social.

Notre dissolution, si elle venait à se concrétiser, ne mènerait évidemment pas à éteindre la combativité de longue date du mouvement social rennais. Elle ouvrirait en revanche un boulevard aux pratiques répressives, en interdisant purement et simplement le travail que nous menons pour assurer une défense de qualité et dans les meilleures conditions à toutes et tous les inculpés, quels que soient leurs revenus, leur situation sociale, judiciaire ou personnelle.

Nous réaffirmons également autre chose : notre activité de défense judiciaire des inculpés nous amène à défendre tous les camarades mis en cause lors des mouvements sociaux, quand bien même nous serions en désaccord politique ou stratégique avec les faits qui leur sont imputés. Ce débat sur la légitimité ou la pertinence des actions appartient aux espaces d’organisation du mouvement, tels que les assemblées générales ou les divers comités. Il ne pourrait être question de laisser ces considérations guider nos choix de défendre telle ou tel inculpé, à moins d’abandonner totalement toute notion de droit à la défense.

Au-delà de notre travail crucial dans les tribunaux, nous revendiquons une présence active dans la rue et assumons des pratiques de défense des cortèges face à la répression, parmi lesquelles l’organisation de la protection du cortège face au gazage généralisé, aux tirs de LBD, de grenades et autres armes de dispersion. Dans une période où le pouvoir et sa police ont maintes et maintes fois montré que tous les manifestants et manifestantes étaient une cible potentielle, nous croyons que la réponse la plus adaptée est la diffusion massive de pratiques de défense communes dans l’ensemble du mouvement social, de la rue aux tribunaux. Nous sommes fiers et fières de défendre une vision émancipatrice de la lutte grâce à nos ateliers juridiques et stratégiques, à la distribution de matériel de protection et de conseils en manifestation et en assemblées, ou encore à la diffusion d’une culture de la défense et de la solidarité à travers les cortèges et bien au-delà de notre petite ville.

Ce qui est attaqué, à travers la Défense Collective, c’est bien plus largement la possibilité même de se défendre ensemble au tribunal, ou de se protéger des armes de la police. Ce sont les pratiques du mouvement social et non seulement celles d’un collectif politique. La question se pose donc : quelles conséquences sur nos pratiques pourrait avoir une procédure de dissolution ?  Le pouvoir compte-il inculper pour « reconstitution de ligue dissoute » tout Rennais ou Rennaise qui déciderait de ne pas se défendre seul au tribunal ? de ne pas se défendre seul dans la rue ? de proposer des formations juridiques en assemblées de lutte ?

Comme nous l’avons déjà dis précédemment, nous pensons que l’emploi généralisé des procédures de dissolution aujourd’hui constitue une nouvelle étape dans la frénésie répressive d’un pouvoir aux abois. Nous tenons à rappeler ici notre opposition formelle à toute procédure de dissolution, qu’elle s’attaque aux camarades ou aux ennemis, car nous nous refusons à soutenir un dispositif répressif qui finit inéluctablement par se retourner contre le mouvement social, comme c’est le cas actuellement.

Une chose est certaine : peu importe la suite des évènements, le combat continuera. Il va sans dire que nous avons l’intention de nous défendre farouchement contre cette procédure si elle venait à se concrétiser. Nous tenons d’ailleurs à remercier tous les collectifs et organisations qui nous ont d’ores et déjà apporté leur soutien, et tous ceux qui continuerons de le faire en partageant ce communiqué.

En attendant d’en savoir plus sur ce qui justifie ce montage politique du ministère de l’Intérieur, nous voulons ici réaffirmer notre engagement auprès des 48 personnes dont nous assurons actuellement le suivi dans les différentes juridictions rennaises et à la Cour de Cassation, ainsi qu’envers toutes et tous les camarades qui subissent la répression policière et judiciaire.

L’appareil répressif, lui, semble encore loin d’être dissout, alors comme toujours nous vous invitons à aider à financer les frais de justice des nombreuses affaires que nous suivons en faisant un don à la Caisse de Soutien aux Inculpé-es du Mouvement Social.

Par ailleurs, nous tenons à rappeler que la Défense Collective s’exprime uniquement en son nom propre, et ne possède à son actif que les canaux de communication qui lui sont directement affiliés :

– notre site https://defensecollective.noblogs.org/
– notre mail defense.collective@riseup.net
– notre permanence téléphonique au +33 7.51.28.26.11 (également sur Signal)
– notre instagram @defensecollective
– notre facebook Défense Collective
– notre compte X @Defense_Co
– notre compte tiktok @defensecollective

Nous continuerons à communiquer sur cette procédure et malgré les déclarations de Darmanin, aucun décret de dissolution n’a été promulgué contre nous. Nous continuons donc nos activités normalement et nous vous invitons à rejoindre les prochains événements publics que nous organiserons pour continuer la lutte, qui seront eux aussi annoncés via les réseaux mentionnés plus haut.

Le prochain rendez-vous portera d’ailleurs sur cette dissolution, puisque nous vous convions à un atelier qui aura pour but d’expliquer l’histoire et le fonctionnement de cette procédure, le jeudi 15 février à 18h à la Bibliothèque Universitaire de Beaulieu.

À bientôt dans la rue et dans les tribunaux !
– LA DÉFENSE COLLECTIVE

Télécharger le communiqué en format PDF.

DISSOLUTION DU « MOUVEMENT DEFCO » : COMMUNIQUÉ DE LA DÉFENSE COLLECTIVE SUITE AUX ANNONCES DU MINISTRE DE L’INTÉRIEUR

Nous avons appris par voie de presse la volonté du Ministre de l’Intérieur de dissoudre le « mouvement DefCo », à la demande notamment du Front National, et ce au motif d’appels au « soulèvement ».

A notre connaissance, aucun courrier en vue d’une réelle procédure ne nous a été envoyé, nous n’avons donc aucune idée des motivations de cette éventuelle dissolution ni de l’entité qui serait visée. En effet, l’appellation « DefCo », employée par le ministre est à Rennes un terme que l’on retrouve régulièrement dans les dossiers judiciaires, les PV de la préfecture et les articles de presse pour désigner toute pratique dite « contestataire ». Impossible donc pour le moment de connaître l’étendue des personnes et groupes qui pourraient être concernés par la dissolution. En l’état ces annonces pourraient viser la DC ainsi que des tas d’autres acteurs et actrices du mouvement social, voire des espaces d’organisation comme les assemblées de lutte.

Ceci étant dit, si c’est bien la DC qui est visée, alors le timing de cette annonce nous semble loin d’être anodin : dans cette séquence de conflit social où la répression policière et judiciaire atteint de nouveaux sommets, et où la gestion du mouvement social par l’État subit une vague de critiques sans précédent, le pouvoir semble désormais exprimer sa volonté de s’attaquer aux collectifs de soutien juridique et d’aide aux manifestants et manifestantes visés par la répression. Si la Défense Collective venait à être dissoute, c’est potentiellement toutes les structures anti-répression et legal teams du pays qui pourraient subir le même sort.

Que l’État s’attaque aussi frontalement et publiquement au droit à la défense en plein milieu d’un mouvement social est inédit et grave, qu’il le fasse à la demande et avec la complicité du Front National est encore plus inquiétant.

Le Ministre de l’Intérieur et ses amis du FN semblent tenir leur « DefCo » chimérique pour responsable de la contestation sociale et de la lutte antifasciste rennaise. Tandis qu’une simple visite dans les nombreuses et foisonnantes assemblées de lutte rennaises aurait suffit à dissiper ce fantasme, un rapide coup d’œil sur notre blog ou nos réseaux sociaux aurait quant à lui suffit à rendre compte de la réalité de notre travail : la Défense Collective a pour but de rassembler et soutenir les personnes confrontées à la répression et aux ennemis du mouvement social, mais aussi d’agir en amont par son action dans la rue et par l’expérience tirée de la répression. Nous sommes un groupe entièrement ouvert et public, autonome des organisations politiques, indépendant des commissions et des assemblées. Espace de composition dont la participation aux réunions concerne des centaines de personnes aux sensibilités politiques diverses, nous assumons et nourrissons des discours critiques sur la police et la justice.

Depuis notre fondation en 2016 et le mouvement contre la Loi El Khomri, nous avons travaillé avec plusieurs centaines d’inculpés et inculpées des mouvements sociaux afin d’élaborer collectivement les meilleures défenses possibles. Nous avons de cette façon obtenu de très nombreuses victoires et jurisprudences utiles à tous les justiciables et à l’ensemble du mouvement social.

Au-delà de notre travail crucial dans les tribunaux, nous revendiquons une présence active dans la rue et assumons des pratiques de défense des cortèges face à la répression, parmi lesquelles l’organisation de la protection du cortège face au gazage généralisé, aux tirs de LBD, de grenades et autres armes de dispersion. Dans une période où le pouvoir et sa police ont maintes et maintes fois montré que tous les manifestants et manifestantes étaient une cible potentielle, nous croyons que la réponse la plus adaptée est la diffusion massive de pratiques de défense communes dans l’ensemble du mouvement social, de la rue aux tribunaux. Nous sommes fiers et fières de défendre une vision émancipatrice de la lutte grâce à nos ateliers juridiques et stratégiques, à la distribution de matériel de protection et de conseils en manifestation et en assemblées, ou encore à la diffusion d’une culture de la défense et de la solidarité à travers les cortèges et bien au-delà de notre petite ville. 

Nous pensons que l’emploi généralisé des procédures de dissolution aujourd’hui constitue une nouvelle étape dans la frénésie répressive d’un pouvoir aux abois. Nous tenons à rappeler ici notre opposition formelle à toute procédure de dissolution, qu’elle s’attaque aux camarades ou aux ennemis, car nous nous refusons à soutenir un dispositif répressif qui finit inéluctablement par se retourner contre le mouvement social, comme c’est le cas actuellement.

La Défense Collective étant un espace large, s’organisant sur le modèle d’assemblées publiques hebdomadaires, il nous tarde de voir quel « groupuscule » le Ministre de l’Intérieur va constituer artificiellement dans le but de le dissoudre. Il nous apparaît clair qu’une telle procédure n’a pas pour but de viser la Défense Collective en tant que groupe, mais bien en tant que pratique. Car ce n’est pas une idéologie mais bien nos pratiques de défense face à la répression qui nous réunissent au sein de la DC. La question se pose donc : quelles conséquences sur nos pratiques pourrait avoir une procédure de dissolution ?  Le pouvoir compte-il inculper pour « reconstitution de ligue dissoute » tout rennais ou rennaise qui déciderait de ne pas se défendre seul au tribunal ? de ne pas se défendre seul dans la rue ? de proposer des formations juridiques en assemblées de lutte ?

Une chose est certaine : peu importe la suite des évènements, le combat continuera. Il va sans dire que nous avons l’intention de nous défendre farouchement contre cette procédure si elle venait à se concrétiser. Nous tenons d’ailleurs à remercier tous les collectifs et organisations qui nous ont d’ores et déjà apporté leur soutien, et tous ceux qui continuerons de le faire en partageant ce communiqué.

En attendant d’en savoir plus sur ce qui semble de prime abord être un grossier effet d’annonce, nous voulons ici réaffirmer notre engagement auprès des nombreuses personnes arrêtées dans le mouvement contre la réforme des retraites, envers la quelque trentaine d’inculpés et inculpées que nous suivons actuellement, ainsi qu’envers toutes et tous les camarades qui subissent la répression policière et judiciaire.

L’appareil répressif, lui, semble encore loin d’être dissout, alors comme toujours nous vous invitons à aider à financer les frais de justice des nombreuses affaires que nous suivons en faisant un don à la Caisse de Soutien aux Inculpé-es du Mouvement Social.

En accord avec notre fonctionnement habituel, nous organisons ce vendredi 7 avril à 17h30 un atelier public, ouvert à toutes celles et ceux qui souhaitent s’organiser contre la répression, dans lequel nous reviendrons sur l’histoire des dissolutions de groupes politiques et l’évolution du droit depuis la loi dite « séparatismes », suivi d’une réflexion collective autour des stratégies de défense que nous ou n’importe quel autre groupe pourrait adopter en cas de dissolution. Rendez-vous comme d’habitude sur le parvis de la Bibliothèque Universitaire du campus de Beaulieu (accessible via le métro ligne B, arrêt «Beaulieu Université»)

À bientôt dans la rue et dans les tribunaux !
– LA DÉFENSE COLLECTIVE